Un théatre... des marionnetes

Matelot Messages : 123 Date d'inscription : 05/07/2010

L'affiche était là depuis quelques jours...
Milosevik passait devant deux à trois fois par jour et machinalement il s'arrête devant.
Yeux fixes dessus, perdu dans ses pensées.

Ce n'est qu'en fin de semaine qu'une idée lui vient en tête en tombant sur la carcasse d'un animal que Juan avait chassé.
Le Mexicain était tout content d'avoir réussi à avoir cette bête croisée entre le chien et le rat. Une étrange mutation... bien loin de Taz et ses origines.
Milosevik lui demande s'il peut récupérer la dépouille et c'est tout naturellement que Pablo accepte.

La suite c'est avec Saki que Jess voit cela. Il lui demande d'empailler la bête avec les moyens du bord. Ce qui veut dire des produits récupérés par ci et par là mais aussi quelques doses de produits chimiques récoltés dans l'Outpost de la montagne. Il rajoute une précision... d'y laisser un cavité dans le corps pour glisser une main. Dans la même journée Jess retrouve Uggly qui s'était isolé en bordure du port... vers la forêt. Il remarque que son ami irradié tue le temps en taillant divers bibelots en bois. Prit par l'idée de l'affiche, le balafré demande à Uggly de confectionner une marionnette qui pourrait représenter l'être de la forêt.
N'a qu'un œil accepte sans mal.

Deux jours suffisent à Saki pour faire le travail.
Bordel que ça puait. L'odeur était infecte. Mélange de produits chimique... de chair décomposée et d'on ne sait quoi.
Jess regarde le museau de la bête et tente une prise en main. L'entrée était poisseuse et l’intérieur comme un gros vagin. Saleté de marionnette...
Le Serbe l'articule et y rajoute une toge de tissu. Un grand merci à son amie Asiatique et il part rajouter des herbes odorante.

Pour Uggly c'était le troisième jour.
Quand il voit le travail de l'irradié il y voit plutôt un pantin. Uggly avait comprit de travers une fois de plus mais l’œuvre inspirait.
Son complice se marre et lui passe. Jess ira lui raconter cette histoire de théâtre et tente de le convaincre de venir... même s'il doit se cacher.
Voila donc le gominé avec deux marionnettes. Il passera une bonne partie de la nuit à leur jeter des regards pendant ses activités.

Le lendemain dans l'après midi Jess cherche et trouve Fozzie.
Il lui demandera s'il peut faire un essai à la scène... dans la pénombre, avec un léger éclairage et un rideau noir.

- Hey Fozzie... j'ai deux amis pour Barbara.
Ca serait bien qu'ils s'expriment un peu. Je vais te les présenter.

Lui c'est Woody, le gardien de la forêt.
Et lui c'est Kref, le rôdeur de la forêt...

Un théatre... des marionnetes Krefratgarou

Le Serbe ne rigolait pas. Il avait mit sa main droite dans Kref et sa main gauche derrière Woody.
Les deux petits êtres faisaient mine de découvrir l'homme en face d'eux.

Le Fozzie avait placardé l'affiche créée par Nouanda et attendait les retours.
Le premier jour, rien.
Le deuxième jour, rien.
Le troisième...
Rien, c'était une façon de parler, rien au moins durant les périodes qu'il passait dans le théâtre, quand il n'était pas à la sécurité du port, à l'observation des environs depuis le phare de l'amiral, à l'entrainement, en train de manger ou de dormir.
A chacun de ses passages, il vérifiait les traces d'une éventuelle visite. Un bout de ficelle qui aurait bougé, un morceau de tissu abandonné sur la table.

Voilà qu'un jour un homme l'interpelle sous la tente qui fait office de théâtre. Le gars a deux beaux spécimens en main.

- Ouais, ouais, j'vois ça. Woody et Kref. Bien l'bonjour gentlemen.

Fozzie prend un ton solennel, parle fort, fait de grands gestes pour montrer les lieux et tourne sur lui-même.

- Soyez les bienvenus dans l'antre des théâtreux de fortune du Port d'Oileán Thoraí. Que vous soyez spectateur, que vous soyez acteur, ce lieu n'en demande pas moins que votre présence.

D'un bond, il vient coller son nez à 2 centimètre de Woody. Il prend le ton complice d'un gredin à un autre prêts à commettre un larçin.

- Crois-tu que tu peux arranguer les foules et leur montrer que tu n'es pas qu'un pantin de bois ?

Matelot Messages : 123 Date d'inscription : 05/07/2010

Le Serbe reste un moment sans rien dire quand Fozzie leur parle.
Pourtant c'était son truc de faire de la comédie... mais comédie sur du réelle. Façon un peu de gérer une situation merdique ou énervante en face de lui. Mais là c'était avec deux êtres fictifs. Des marionnettes...
Bon, fallait juste se mettre à leur place et de laisser aller son imagination. Quelle soit infantile, torturée ou basée sur des souvenirs.

Alors Milo articule la mâchoire de Kref et lui fait faire un sourire carnassier. Le travaille de taxidermie de Saki pouvait le permettre.
La gueule de l'animal laisse découvrir de biens pointus crocs.

Pour l'articulation de Woody c'était bien plus difficile. Les tiges rajoutées sur les cotés ne faisaient que bouger les bras. Les doigts de maintien de pouvaient que bouger la tête. C'était limité. Tout aller se jouer sur sa gestuelle et la voix... contrairement à Kref qui lui pouvait faire des expressions.

Alors Jess émet un ricanement animal et sourd avec son loup rapiécé.

- Yié Yiéi Yiééééé

Et fait mine d'être gêné avec Woody.
La bouche du Serbe bougeait à peine quand il le fait parler. Une voix aiguë et hésitante.

- Je... je ne sais pas monsieur Fozzie.

Jess lève un sourcil en regardant l'homme. Il fait une grimace et va poser les deux marionnettes sur la scène improvisée.
Il ira couvrir les sources d'éclairage... puis placer des bougies sorties de sa poche du trois-quart. Ce ne fut pas tout... le balafré sort de sa sacoche le MP3 modifié et relié à deux petites baffles. Il les pose et termine par brancher la recharge solaire au tout. Il cherche un moment puis appui sur "lecture".

https://youtu.be/tfXaGwNF3es

Silencieusement il va allumer les bougies et prendre en main les deux compères avant d'engouffrer son corps dans la pénombre.
Seuls les deux marionnettes sont visibles à la lueur de l'éclairage de la scène.
Milosevik prend sa voix grave et lente pour conter.

- Woody sur un arbre perché,
Tenait dans sa bouche un marron.
Kref, par l'odeur alléché,
Lui tint à peu près ce langage :

- Hé ! bonjour, Monsieur en bois.
Que vous êtes joli ! que vous me semblez beau !
Sans mentir, si votre ramage
Se rapporte à votre boisage,
Vous êtes le Phénix des hôtes de ces bois.

- A ces mots le petit être de bois ne se sent pas de joie ;
Et pour montrer sa belle voix,
Il ouvre une large bouche, laisse tomber sa proie.
Le loup s'en saisit, et dit :

- Mon bon Monsieur,
Apprenez que tout flatteur
Vit aux dépens de celui qui l'écoute :
Cette leçon vaut bien un marron, sans doute.

- Woody honteux et confus,
Jura, mais un peu tard, qu'on ne l'y prendrait plus.

Woody est hésitant et la bête fait sa bête, rien que du normal. L'homme par contre se lance dans une mise en scène, gère l'espace, la lumière et le son comme chez lui. Fozzie s'installe sur le seul banc ramené la veille sous le chapiteau. Il écoute, il regarde. Quand le silence et l'immobilité reviennent, il ne bronche pas plus. Au bout d'un moment il se gratte la barbe.

- On peut dire que tu connais ton texte. On peut dire que la mise en scène ne t'ai pas étrangère. Y'a pourtant un manque. L'espace entre toi et moi est resté vide. Ca vaut le coup d'oeil, mais ça ne fait pas frémir. Tu n'as pas donné ton coeur ni a Woody, ni à Kref. Tu as un coeur, l'homme ?

Matelot Messages : 123 Date d'inscription : 05/07/2010

Il manquait bien les trois coups finaux pour clôturer.
Milosevik fixe l'homme en face de lui, dans la pénombre. Le verdict tombe et ne l'étonne pas.
Rien de plus normal comme critique de la part d'un type qui doit connaitre son domaine. Domaine improvisé depuis peu par Jess.

Le Serbe quitte sa planque, pose les deux êtres sur le bord de l'estrade, éteint le MP3, souffle les bougies et va placer la chaise de la scène à coté de Fozzie. Il y prend place et expire tout en regardant fixement les deux marionnettes.

- Normal...
Bien que Kref me correspond... en quelque sorte, ce ne sont pas mes œuvres.
Le bonhomme de bois a été fait par un de mes camarades. Une simple commande. L'autre bêbête est à base d'un animal empaillé qu'une amie a travaillé.
Et ce texte est une reprise d'écrits avant-Crash... ça tu dois connaitre aussi.

Silence.

Le balafré reprend lentement. Cette fois ci en tournant la tête pour regarder Fozzie. Le faible éclairage de la tente rendait une étrange ambiance.

- Si j'ai un cœur...
Je ne sais pas. Ca serait un mauvais jugement de se juger soi même.
Aux autres qui m'ont croisé de le dire. Par contre les plus mécontents de mon humanité ne pourront plus le faire.
Comme j'aime à le dire... la survie est faite de choix. Bons ou mauvais ce qui compte et de rester en vie en entrainant le maximum de monde.
Pour ce qui est de faire prendre vie à ces deux êtres fictifs, ça semble toi le spécialiste.

Jess fait une vague avec le bras, la paume de la main vers le plafond, comme pour inviter Fozzie.

- Mais vas y... Montre moi. Fais moi grâce de ton savoir, ton âme, ton cœur pour une scène.
Je demande à apprendre. A voir. A ressentir.
Arriverais tu à improviser une scène avec nos deux amis ?

Un petit défis... juste pour apprendre des deux cotés...
Le Serbe avait fait l'effort... l'homme aux marionnettes arrivera t-il à compléter ?

L'homme est honnête sur sa part de boulot.

- Si tu avais construit toi même la marionnette, je ne suis pas convaincu que tu lui aurais donné plus d'âme.

Il n'attend pas de réponse, il a une invitation, il s'acquitte. Il se lève et investit à son tour la scène. Bougies pour lumière d'ambiance et accentuer les ombres, rideau noir tendu en travers de l'estrade pour se cacher derrière. En plus du pantin, on voit une paire de gants sombres qui assoit Woody sur la ligne du tissu et l'ombre indéterminé du comédien.

Silence.

Le pantin de bois prend vie par le geste.
Il regarde à droite, à gauche. Lentement. De nouveau à droite, à gauche.
Sa tête se tourne pour faire voyager un regard suggéré sur l'espace autour de lui.
Ses mains de bois l'interpellent maintenant. Il bouge la droite, la découvre.
Il sursaute, se détourne brusquement, affolé par un bruit. Il inspecte la pénombre de la salle de spectacle, se penche dans tous les sens possibles, semble s'apaiser progressivement quand la vivacité du mouvement retrouve la lenteur.
Il reporte son attention sur ses mains. Le mouvement passe du curieux à la lassitude. Le bras tombe.
L'autre main remonte, se pose à plat sur son front et descend, découvrant les traits du visage au fur et à mesure de son voyage.
La tête bouge à la recherche de quelque chose.
Woody insiste sur un point dans la salle, prêt à chavirer en avant.
La main se pose sur le bord du tissu comme pour l'agripper et éviter de chuter.
Sa main droite vient en perpendiculaire au dessus des yeux pour permettre au regard de scruter plus profondément. Il a trouvé. Il a trouvé Milosevik. Il l'observe. Sa main redescend. La tête de bois fixe l'homme un long moment.

- Papa ? Pourquoi tu me laisses tout seul ?

La voix enfantine de Woody a taillé une brèche dans le silence qui se referme dès le dernier mot envolé. Son visage n'a pas bougé, il fait toujours face au serbe.

Matelot Messages : 123 Date d'inscription : 05/07/2010

Il n'ajoute rien à ce que dit Fozzie.
Juste une grimace coincée sur le coin du visage. Un peu pour dire "peut-être" ou "t'as raison".

L'homme ne tarde pas à accepter en silence le défis.
C'était son domaine.

Jess le regarde faire et s'enfonce un peu plus sur la chaise en bois.
On aurait dit qu'il allait subir un truc gênant. Pas à l'aise du tout.
Il se frotte le front, passe sa main sur le menton, délivre une nouvelle grimace.

Woody entre en action, mené par les mains de l'homme aux marionnettes.
Les yeux du Serbe ne loupent rien même s'il avait envie de quitter cette "pièce".
Et quand "Woody" s'adresse à lui, Jess faillit se retourner pour regarder derrière lui. Il reste tout de même sur place.
Silence...

Ouais... ce n'était pas facile. Allons... jouons le jeu.
C'est avec sa voix lente et grave que Jess répond. L'air sérieux.

- Tu... tu n'es pas tout seul tête de bois.
J'ai demandé à un de tes semblables d'habiter la même forêt que toi.
Tu ne l'aimes pas ta forêt ? Tu as déjà rencontré Kref ?

Parler aux Répliquants... aux aliens... aux morts... aux animaux et maintenant à une marionnette.
Décidément, ce nouveau monde était plein de surprises.

Woody inspecte les environs vérifiant qu'ils sont seuls, lui et son "père", doucement il lui répond :

- Kref, il me fait peur. Il a de grandes dents et un regard méchant. J'ai peur qu'il me mange. Tu vas me protéger, dis ?

Il a un soupir triste.

- J'ai personne de gentil avec moi, pour jouer avec moi. J'ai personne pour me lire un livre et me border le soir. J'ai personne pour me chanter une chanson avant de m'endormir. Toi tu es occupé, dis ? Tu peux le faire ? Tu as le temps de le faire tous les soirs ?

De plus en plus triste.

- Dis papa ? Est-ce que j'ai une maman comme tous les petits garçons ?

Matelot Messages : 123 Date d'inscription : 05/07/2010

Le Serbe fixe Woody et se concentre sur cette "vie" soudainement crée.
Il écoute, le regarde et lui répond d'une voix douce.
Fort heureusement qu'il n'y avait qu'un seul témoin de la scène... le maitre des marionnettes.

- Kref ne peut pas te faire mal. Tu es fait de ce qui t'entoure... Il se casserait les dents.

Milo regarde un instant ailleurs, comme gêné. Il reporte ses yeux sur l'être de bois.

- Tes parents...
Ils sont la forêt. Tes origines... Tu es chez toi ici Woody.
Moi je ne suis pas d'ici.
Je ne pourrais pas être tout le temps avec toi.

L'apprenti complice de la scène se penche sur le coté de la tête de la marionnette.

- Mais je vais te dire un secret...
Il y a une certaine Barbara... cherche et trouve. Elle pourra être ta nouvelle famille.
Elle est seule et recherche elle aussi de la compagnie.
Moi... moi je dois repartir. Je reviendrais petit être.

Grande respiration.
Jess redresse la tête pour regarder Fozzie.

- Ouais...
L'interaction avec le publique. Je vois.
Avec des adultes ça va pas trop le faire dans notre nouveau monde hein ! Ils sont ou les enfants ?
Entre les beuvries et les bagarres... ils sont ou les divertissements ?
J'opterais plus pour un cinéma, une piste de danse ou des jeux de sport pour distraire ce qui reste de survivants.
Ca va être difficile de faire vivre le théâtre Fozzie... tu le sais ça ?

- Je le sais.

Plus de mise en scène, le spectacle est fini. Woody est redevenu un pantin de bois trainant les pieds au sol, le cou serré par la main de l'homme.

- Je sais. La vie se résume à boire et à tuer, oui, trop souvent. Pourtant regarde. Des hommes ont pris la peine de construire un port. Ils cultivent la terre. Ils font des projets. Ils ont posé ce théâtre ici, alors qu'ils auraient pu mettre une forge à canons. La salle est vide, cela ne t'a pas empêché franchir la porte, de créer un spectacle. Un de ces quatre, quelqu'un d'autre franchira le seuil.

Matelot Messages : 123 Date d'inscription : 05/07/2010

Le Serbe croise les bras, menton enfoncé vers le torse, et écoute Fozzie exprimer ses pensées.
Dès qu'il termine le balafré enchaine de sa voix lente et grave.

- C'est une façon de voir.
Une autre serait de dire que ce n'est pas la vie mais bien la survie. On tue pour survivre. On boit pour oublier.
D'un autre coté si un port est construit c'est pour faire des embarcations et accroitre sa force en mer.
Si des champs sont cultivés c'est pour nourrir ses hommes qui partent se battre.
Ils font souvent des projets comme tu dis... souvent à des buts de guerre.
C'est ainsi. C'est pour la survie. Faire la guerre pour avoir la paix.

Il décroise les bras et secoue son doigts vers les marionnettes.

- Ce théâtre par contre reste dans un but non guerrier hein !
Alors oui... travaille le. Tente de trouver des survivants qui s’intéressent à autre chose qu'à tuer, baiser, voler ou boire pour se défoncer.
Si je m'y suis penché c'est qu'il doit rester un peu d'humanité et de rêve en moi.
Et ça tu y as travaillé Fozzie.

Le gominé prend Kref dans ses mains et vient l'apporter à l'homme.

- Ecoute...
Je te laisse nos deux amis. Ils vivront des aventures chez toi.
A l'occasion tu peux passer à la sorte de Pub qui se termine de construire. J'y suis avec mon équipe... et ça serait bien que l'on reparle toi et moi.
Ok ?

Fozzy prend Kref dans ses bras avec l'attention qu'on porterait à un bébé.

- Le pub près du resto de la jetée ? J'y ferais un tour à l'occasion.