Le petit carnet

Les gouttes d'eau plongent les unes après les autres, sur un rythme régulier pour se perdre dans l'immense lac souterrain. La voix de Kristen résonne dans un rire insouciant.
Puis ce sont ses murmures brûlants et tristes qui soufflent dans l'oreille d'Emi.

Trouver le repos dans une mort presque annoncée... ça aurait été surement trop beau. Un corps sans sépulture ne rend pas une âme paisible. Il me laisse errer, sans fin, sans but. Je voulais me libérer d'une solitude trop pesante et j'ai trouvé un asile déserté. C’est peut être ça l'Enfer. Au fond de moi, je sais que je ne mérite pas d’aller autre part qu'en bas, mais a y regarder de plus près, c’est bien pire que ça. Les limbes auraient été douces a coté d'une âme bloquée là ou la vie a été pénible.

Ressentir...les autres, leurs peines, leurs joies, leurs âmes. C'est tout ce qui me restait avant de trouver la paix. Peu de gens sont capables de me ressentir a présent, mais certains ont ce don.
Comment me suis-je retrouvée là, dans cette grotte, avec "toi"? Je te croyais a New Vegas a jouer avec les rats. Quelque chose t'a amené ici, dans cette ville, et cette même chose peut être m'a amenée vers toi. Le handicap peut être un don parfois. Les aveugles perçoivent ce que personne ne voit.

Kristen erre, Kristen flotte... elle est morte. Pourtant elle se souvient, ses doigts frôlent le carnet qu'elle a offert a Emi, s'y attardant plus que nécessaire. Plus rien n'est essentiel pour elle, hormis peut être d'apaiser le passé.

[note hrp : texte écrit par Kristen]


Emily se réveille en sursaut, des larmes chaudes sur ses joues. Sous cette tente glacée, elle sent sous sa main le carnet de photo offert par la jolie tête blonde, lors de son séjour à New Vegas.
Ses doigts caressent le papier glacé, elle sait pertinemment ce qu'il y a sur ce cliché de polaroïd, sans jamais l'avoir vu.

Toute la matinée, le souvenir de cette journée avec Kristen l'obsède, avec un goût d'inachevé et d'un gâchis immense.
Elle profite qu'il vienne, comme il le fait d'habitude pour échanger quelques plantes contre de l'eau avec les autres habitants du camp, pour enfin lui adresser la parole.
L'air grave.

"Jess. Ce serait bien que nous parlions. Seul à seul."

Un homme au teint mât vient déposer plusieurs sacs non loin des pieds du serbe.
Il sort un couteau et coupe avec rapidité la corde qui fermait encore l'un d'entre-eux.
Rangeant sa lame, il secoue le sac pour l'aérer quelque peu et y plonge une main pour mieux en observer le contenu.

"C'est du saule, l'en reste pas beaucoup, j'te l'pose ici...
C'est pour les états grippaux plutôt...
J'reviens avec la suite..."

Il s'apprête à partir quand il voit cette femme arriver.

"Mademoiselle..."

Elle est salement amochée et son regard a quelque chose d'étrange et de mystérieux, mais il n'y prêtera que peu attention.
Non, ce qui attire son regard ce sont ces bleus...
Aslan fronce les sourcils et jette un regard sévère autour de lui...
Il se demande encore ce qu'il se passe dans ce camp et avec qui il partage son pain, mais il n'obtiendra pas de réponse aujourd'hui.
Il attrape quelques bidons d'eau, observe l'aveugle s'éloigner en direction du porche, puis décide finalement de poursuivre la tâche qui lui avait été assignée.

Elle tourne le visage vers la voix d'Aslan, pas vraiment certaine d'être la demoiselle qu'il salue. Voilà longtemps qu'elle ne se sent plus -Mademoiselle-, en tous cas.
Elle a encore les marques de ses retrouvailles houleuses avec Mazzy, mais les cicatrices sont en bonne voie de guérison et les bleus presque résorbés. C'est un peu la contre-partie du virus GV3N10+.
Pour le reste de la présentation de l'aveugle, Milo peut s'apercevoir qu'elle a pris un pli vestimentaire plus -nomade- qu'à Vegas. Plus de ballerine, plus de robe de coton.
Juste des bottes, un jeans, et ses vieux châles.

Ce qui est pratique, c'est qu'il est inutile de soutenir son regard. Et à voir ses hésitations à rejoindre l'endroit indiqué par le Serbe, sa vue a certainement régressé depuis le départ des Flesh de la ville souterraine.

"J'ai rêvé de Kristen... Cette nuit."

Sa voix se trouble. Elle cherche la force de continuer de parler sans se laisser submerger par la culpabilité.
Elle sort un cliché du Polaroid de la poche intérieure de sa veste de cuir.

"Je te demande pardon. Je ne m'attends pas à ce que tu acceptes mes excuses. Je voudrai juste que tu prennes ça... C'est notre cadeau pour toi... Une Photo que j'ai réussi à prendre... Au lac souterrain."

D'un geste lent, elle tend l'image presque vivante de Kristen, à jamais jeune.

Flash back:

Le Serbe avait reculé la tête à la vue et l'odeur du poisson. Il salue le Turc avant qu'il s'en aille chercher le reste.

In live:

Quand ils arrivent sous le porche en ruine, Milosevik tire sur sa roulée en tournant le dos.
Chose rare avec quelqu'un. De toute façon elle était aveugle et chercher dans son regard ne fera pas d'échange. La voix primait.

"J'ai rêvé de Kristen... Cette nuit."

Dit elle...
Il ne dit rien suite à cela. De son coté il en rêvait pas... il y pensait sans cesse. En une seconde elle avait réussi à l’agacer en abordant "Kristen".
Sur quel terrain allait elle l'embarquer ?

"Je te demande pardon. Je ne m'attends pas à ce que tu acceptes mes excuses. Je voudrai juste que tu prennes ça... C'est notre cadeau pour toi... Une Photo que j'ai réussi à prendre... Au lac souterrain."

Le lac souterrain... il s'en souvient. Les photos aussi... surtout celle retrouvée dans la main cybernétique de Neverback qu'il venait de tuer.
Comme elle lui propose une photo de Kristen il se retourne pour lui prendre rapidement des mains. Il tire nerveusement sur le reste de sa cigarette et répond assez rapidement:

- Je ne suis pas Youpin, je ne donne pas mon pardon. Ne les attends pas. Je veux des actes... J'ai toujours préféré les actes à la parole.

Il positionne la photo de Kristen au niveau de ses yeux et la regarde un moment.
Milo ferme les yeux. Il range la photo dans une poche intérieure de son trois-quart. Il ouvre à nouveau les yeux et prend une grande respiration avant de reprendre la parole.

- Je me doute qu'elle ne te servira pas. Elle sera bien mieux avec les autres photos que j'ai d'elle.
Donc merci de me l'avoir apporté pour éviter que des yeux de chiens se portent sur elle.
Je n'ai même pas pu faire son deuil... Je suis haineux, énervé et un rien à son sujet peut me faire péter un câble Emily.
Pourquoi es tu à Santa ?

Cette question était cash. Il attendait devant elle... les sourcils froncés.

Au premier abord, la colère et le ton du Serbe agace l'aveugle qui écrase nerveusement ses larmes. Il la remercie quand même. Pas de surprise lorsqu'il lui confirme qu'il n'y aura aucun pardon.
Elle acquiesce nerveusement. Elle a déjà envie de s'en aller, mais elle glisse sa main dans une poche de son blouson.

"Je ne suis pas ici pour faire du mal aux tiens ou à toi. Si c'est ce que tu souhaites savoir."

Elle aimerait lui supplier de faire son deuil. Qu'il la laisse partir. Mais il l'a prévenu. Il ne veut rien savoir, rien entendre à propos d'elle.
Elle continuera de la sentir partout ici. Tout comme ses avertissements, et ses envies de réconciliation. Désolée Kristen.

"J'ai autre chose pour toi, cette fois. Elle a survécu à l'Enfer de la forge... Elle mérite de te retrouver..."

La chevalière est dans le creux de sa main. Vestige d'une époque.
Et comprimant sa peine pour la jolie blonde dans sa poitrine, elle libère en deux mots le chef des Flesh.

"C'est tout."

Sa lèvre bleue se serre contre l'autre, un sourire timide. Elle enferme la bague rescapée dans sa main, elle acquiesce en murmurant un "merci" plutôt sobre.
Elle entend dans sa voix qu'il est déjà prêt à partir, pourtant ses mots disent le contraire. Elle l'écoute donc sans bouger.
En prétextant de se recoiffer d'une main, elle cache un peu le haut de son visage. Il va finir par la faire chialer vraiment.
Ce ne sera pas la première fois, mais ce n'est pas cette image d'elle qu'elle a envie de lui donner.
Alors, après quelques secondes de respirations profondes, elle parle plus bas.

"Il ne tient qu'à toi que ce ne soit pas que des souvenirs. Je suis prête à tourner la page. A aller de l'avant avec toi... "

Et puis, elle ne peut s'empêcher de reparler d'elle, et de ses regrets.

"... Le pire, c'est de ne pas lui avoir reparlé avant son départ... Parce que nous nous sommes brouillés, toi et moi. Avec elle, il m'a semblé que ça avait toujours été paisible... Elle ne méritait pas mon silence. Mais c'était plus facile pour moi."

Elle soupire sans raison, alors qu'elle range la bague dans sa veste.

"Je ne sais pas si je mérite de venir, mais j'accepte ton invitation. Ça me touche."

"Encore merci."